La Diversité contre l’Egalité.

A l’occasion du débat actuel sur l’identité nationale,  la réalité des migrations passées et récentes, des multiples niveaux d’intégration  sont évidemment abordés. Pour avancer dans la réflexion entre intégration à la « française  » (c’est à dire, vouloir que les nouveaux arrivant vivent le plus rapidement comme ceux qui sont déjà là, sachant que nos pratiques évoluent sans cesse, mais en tout cas que les nouveaux s’approprient l’essentiel de nos idéaux républicains et démocrates) et le multi-culturalisme communautaire de type anglo-saxon, voici La diversité contre l’égalité.

C’est le titre français de l’excellent livre de l’américain W.B.  Michaels publié chez Raisons d’Agir qui, s’appuyant sur la politique américaine de diversité, de communauté et de discrimination positive, nous montre les véritables objectifs actuels des néolibéraux et ceux, pervertis, de la gauche, les limites de ces politiques et surtout l’atteinte faite au principe d’égalité, avec comme racine principale des problèmes, l’inégalité économique.

Plus divers qu'égaux ?

Plus divers qu'égaux ?

Mon résumé :  » L’introduction transpose cette analyse à la France à travers les discours politiques, les éditoriaux des journalistes dans lesquels on retrouve  les mêmes biais. L’erreur de penser qu’en traitant à part chaque communauté, chaque particularité et en les rendant visibles via quelques personnes bien placées, cela résoudra les problèmes économiques et d’intégrations. Il démontre que s’occuper de la diversité permet d’occulter la volonté d’égalité des droits et de réduction des inégalités. Si sur le devant de la scène c’est la diversité alors tout ira bien en coulisse.

Le combat pour la diversité utilisé par les néolibéraux se substitue au combat pour l’égalité et fragilise donc les remparts qui contenaient encore les dérives du système. La gauche, de son côté, en s’évertuant à bannir le racisme, le sexisme (combats dignes) a perdu la volonté de réduire le fossé entre riches et pauvres. Le PS a choisi la voie de la lutte contre les discriminations et l’intolérance pensant que cela apportait de la justice sociale (vraie en partie) mais a oublié de traiter la racine du problème, l’exploitation de certaines catégories sociales. Pendant ce temps l’élargissement du fossé entre les très riches et le reste de la population ne cesse de croitre. En d’autres termes, une justice sociale qui accepte les injustices du système actuel, si dans le groupe des riches il y a proportionnellement autant de noirs, de jaunes, de maghrébins, de blancs, de femmes,  d’homosexuels… que dans le reste de la population. Et donc, au fil des ans, à droite comme à gauche, les discours s’accordent sensiblement pour nous dire que le vrai sujet est les différences culturelles et pas les différences économiques.

Ou est le problème ? Dans la volonté de ne plus assimiler les migrants, les différents mais de reconnaitre des « identités raciales » (alors qu’il n’existe pas chez les humains d’entités biologiques appelées races), des identités sociales, culturelles, sexuelles, religieuses, alimentaires… Il est plus facile de dire que les noirs et les blancs sont plus opposés que les riches et les pauvres. Fêter la diversité n’entraine pas dans la voie acceptable de l’égalité économique, aucune question de justice sociale ne repose sur la capacité à apprécier la diversité d’origine ou de culture. Les pauvres, d’où qu’ils viennent, quels qu’ils soient, veulent simplement cesser d’être pauvres.

Parlant d’identité, l’auteur explique que le désintérêt de plus en plus total pour l’idéologie et pour les problèmes d’inégalités s’accompagne d’un attachement de plus en plus important pour l’identité. Un monde composé de gens qui sont différents de nous est bien plus séduisant à penser qu’un monde composé de gens bien plus pauvres que nous. Alors que le problème est l’inégalité économique, la solution proposée est l’identité. L’inconvénient de la diversité, poursuit-il, n’est donc pas seulement qu’elle ne résoudra pas le problème de l’inégalité économique ; c’est qu’elle va jusqu’à en masquer l’existence.

Pour la droite, il n’y a pas de problèmes, les inégalités économiques sont dans l’ordre des choses, comme si les conséquences du marché étaient aussi naturelles que celles des marées.

Quant à la gauche, elle s’attache à attribuer aux pauvres des identités (noirs, maghrébins, homosexuel, femme seule…), les considère comme des victimes de la discrimination et soutien que dans un monde sans discrimination, il n’y aurait plus d’inégalité. D’où l’autre inconvénient de la diversité : elle occulte les différences économiques et les différences entre les deux partis politiques.

Du respect  pour les pauvres. C’est pour l’auteur le discours en miroir . La droite néolibérale préfère la notion de statut à celle de classe sociale, quand  la gauche (néolibérale ?) choisit la notion de culture. Reformuler ainsi en terme de diversité, respecter les pauvres se dit respecter le statut de l’autre ou la culture de l’autre. Car pour les néolibéraux, il est préférable et aimable de réduire les préjugés sur la diversité (via la discrimination positive…) que de s’attaquer aux problèmes des inégalités économiques. Il serait difficile de renoncer à une perte d’argent pour beaucoup quand il est plus facile de « sacrifier » quelques places dans des écoles, médias et autres lieux visibles. Les tenant des deux camps cherchent donc avec la diversité à établir une société ou il n’y aurait rien de mal à être noirs, asiatiques, paysans, femmes seules, handicapé…ET pauvre.

Cette doctrine implique le respect des pauvres, pas l’élimination de la pauvreté.

diversité

Et de conclure que, si c’est en l’égalité des chances que réside notre idée de la justice, alors le parcours historique qui a conduit une personne à naitre pauvre n’a rien à voir avec la seule chose qui compte en la matière, le fait que cette personne n’est pas responsable de son milieu et des conditions de pauvreté.

Donc la vraie contradiction, c’est d’être partisan de l’égalité des chances tout en soutenant tout ce qui contribue à créer l’inégalité en ce domaine. C’est pourquoi on ne convaincra pas les gens en leur démontrant qu’ils agissent à l’encontre de leurs intérêts ( ex  : le vote ouvrier en faveur des partis libéraux…), ce qu’il faut, c’est leur monter qu’ils vont à l’encontre de la justice et de l’égalité. « 

Philippe FINTONI

Cette entrée a été publiée dans Conseils de lectures, Economie, Humanisme, Politique Contemporaine, Pratiques politiques, avec comme mot(s)-clef(s) , , , , , . Vous pouvez la mettre en favoris avec ce permalien.

Une réponse à La Diversité contre l’Egalité.

  1. Mamouchka dit :

    Fichtre, c’est tout l’argumentaire de 1789 qui revient !
    Par contre, tenir le discours « la diversité c’est l’opium du pauvre », je vous laisse imaginer le lynchage « politiquement correct ». Malgré tout, il faut le dire !
    En atomisant, par communautarisme, la société, nous revenons aux temps de l’ancien régime alors que nous avons connu l’universalisme, issu de la pensée grecque. C’est aussi le heurt entre « le groupe » et « l’individu »… et la pression sociale, les conformismes etc.
    Combien, pour ce livre, dans la vitrine ?
    Mamouchka.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *